Projection de courts-métrages de fiction : cinq films pour une humanité commune

De notre envoyé spécial à Timimoun : Kader Bentounes

La troisième journée de la compétition du court-métrage de fiction a offert, dimanche soir au théâtre de Verdure de Timimoun, une programmation, où la diversité des écritures rejoint l’universalité des préoccupations humaines, dans le cadre de la première édition du Festival international du court-métrage de Timimoun (TISFF).

Pour son baptême, le festival a mis à l’honneur le Sénégal et dédié sa première édition au cinéma africain. La soirée a été donc aux couleurs du continent avec la projection de cinq œuvres venus d’Ethiopie, Tunisie, Somalie, Cap-Vert et bien entendu d’Algérie. Contrairement aux documentaires, projetés dans l’après-midi dans une salle obscure, les fictions favorisent l’évasion, d’abord en étant projetés en plein air sous les étoiles, ainsi qu’en proposant de l’espoir et du rêve, en dépit de certaines thématiques rappelant la cruauté du monde d’aujourd’hui.

Le film algérien La Victime Zéro de Amine Ben Thamer a ouvert le bal en imposant, durant 18 minutes, un regard frontal sur la violence psychologique causé par l’addiction aux drogues de synthèse et les dérives sociales et familiales qui en découlent. À travers l’histoire de Baha, écolier victime d’enlèvement par son propre frère, le réalisateur interroge les fractures familiales et met en lumière les dangers alarmants des drogues sur l’équilibre social. La sélection s’est ensuite élargie à d’autres horizons, où chaque œuvre construit un dialogue singulier avec son territoire. Avec Alazar l’Éthiopien, Beza Hailu Lemma propose une immersion dans un réalisme teinté de souffle mystique.

La disparition d’un corps dans un tombeau villageois devient le prétexte de ne pas suivre un exode communautaire fuyant la pauvreté et la famine. Une fratrie déclenche une quête intérieure pour comprendre la disparition de leur père où le passé se heurte aux mutations du présent. Bien servi par l’image, le film façonne, 36 minutes durant, une réflexion sur les frontières entre la croyance et la rationalité, le sacré et le profane... De Tunisie, Sur le fil de Sahar El Echi confirme la place croissante d’un regard féminin dans un univers marqué par la domination masculine. A travers l’histoire de Mounira, trentenaire qui tire ses ressources dans un stand de plats à emporter dans un marché de voiture à la banlieue Sud de Tunis. La réalisatrice saisit la résistance quotidienne, discrète, mais tenace, d’une femme contre toutes sortes d’harcèlement et de contraintes.

Par ailleurs, Dust will remember, du jeune réalisateur somalien Mohamed Derman qui porte à l’écran l’odyssée d’un jeune homme traversant le désert à la recherche d’une vie meilleure. En renonçant presque totalement au dialogue, le cinéaste confère à l’image un rôle central dans l’expression d’une mémoire parfois trop lourde pour être formulée. Enfin, La Dernière Moisson de Nuno Bonaventura Miranda clôt la programmation par une méditation sur l’exil et la filiation. À travers le parcours d’un enfant partagé entre la terre natale oubliée et la terre d’accueil imposée, entre l’adaptation avec de nouveaux codes sociaux et l’absence de repères identitaires paternels du jeune Gabriel, le film, tourné en noir et blanc, favorise le dialogue et explore les soubassements de l’identité et l’exil.

K. B.

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