Dans cette interview accordée au journal El Moudjahid, la directrice du Centre de recherche scientifique et technique sur le développement de la langue arabe (CRSTDLA), Mme Ghania Hamdani, revient sur les mutations profondes que l’intelligence artificielle impose à la langue arabe. Elle analyse les opportunités, les défis techniques, ainsi que les nouveaux horizons ouverts dans l’enseignement et la préservation du patrimoine littéraire.
El Moudjahid : Comment définiriez-vous le rôle de l’intelligence artificielle dans la promotion ou la protection de la langue arabe aujourd’hui ?
Ghania Hamdani : L’intelligence artificielle (IA) joue aujourd’hui un rôle déterminant dans la promotion et la valorisation de la langue arabe à l’échelle mondiale. L’avènement des nouvelles technologies, notamment celles dédiées au traitement automatique du langage (TAL), a permis à l’IA de contribuer à la modernisation de l’usage de l’arabe, à faciliter son apprentissage et à renforcer sa présence dans les domaines scientifique et technologique.
Quelles sont les principales opportunités que l’IA offre à la langue arabe, en comparaison avec les technologies précédentes ?
L’intelligence artificielle offre un ensemble ouvert d’opportunités qui dépassent largement les capacités des technologies traditionnelles. En effet, avec l’avènement des technologies modernes et du Deep Learning, le traitement de grandes quantités de données est devenu possible ainsi qu’une réduction drastique de la vitesse de traitement de ces données permettant ainsi à l’IA de dégager des modèles et des tendances plus précises du problème étudié. De même, contrairement aux technologies antérieures, dont le rôle était d’exécuter des instructions fixes, l’IA apprend, améliore et adapte ses performances grâce aux données pour atteindre, le plus possible, le résultat désiré. Grâce à des algorithmes avancés, l’IA offre des prévisions plus fiables dans des domaines, tels que la santé, l’économie, l’éducation ou la gestion des risques, renforçant ainsi la prise de décision.
Quels sont, selon vous, les plus grands défis techniques lorsque l’on applique les modèles d’intelligence artificielle à la langue arabe, notamment concernant les dialectes, la phonétique ou la morphologie ?
L’application de l’intelligence artificielle à la langue arabe présente plusieurs défis techniques, notamment dans le traitement des dialectes arabes. En effet, la diversité dialectale présente souvent des différences remarquables sur les plans : phonétique, morphologique et syntaxique. Ces défis techniques montrent que le développement de modèles d’IA performants pour la langue arabe exige l’utilisation de très riches corpus qui se doivent d’être représentatifs du dialecte parlé. Cela dit et malgré les obstacles cités, des progrès récents dans le domaine démontrent un potentiel important orienté pour améliorer le traitement automatique de l’arabe.
Comment l’intelligence artificielle peut-elle améliorer l’enseignement de la langue arabe pour les locuteurs natifs et non natifs ? Pouvez-vous donner quelques exemples d’outils ou de pratiques efficaces ?
Grâce à la puissance des algorithmes de l’IA, plusieurs solutions innovantes sont disponibles. L’objectif est de rendre l’apprentissage de l’arabe plus accessible, personnalisé, interactif et efficace, quel qu’en soit le niveau de l’apprenant natif ou non. En effet, certaine IA analyse le niveau de l’apprenant pour pouvoir lui fournir des exercices et contenus adaptés à ses besoins. De même, certains outils permettent de corriger instantanément les erreurs grammaticales et orthographiques, et d’offrir des explications personnalisées. Cette interaction peut se faire soit par des dialogues textuels ou bien par de la parole, comme les chatbots éducatifs, plateformes d’apprentissage, etc.
De quelle manière l’intelligence artificielle peut-elle contribuer à la restauration, la numérisation et la diffusion du patrimoine littéraire arabe, notamment les manuscrits, textes anciens ou enregistrements ?
De nos jours, l’intelligence artificielle offre des outils innovants et puissants pour préserver, restaurer et valoriser le patrimoine littéraire arabe. Grâce à ses capacités d’analyse, de reconstruction et de traitement des données, elle permet de faire revivre les anciens manuscrits, les textes détériorés, les vidéos altérées par le temps. En effet, l’intelligence artificielle représente une révolution pour la préservation du patrimoine littéraire arabe. Elle permet la restauration des manuscrits, la numérisation du contenu ancien pour leur préservation pour les générations futures. De même, un elle assure une large diffusion des œuvres auprès d’un public.
A. S.